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LEGAL STRATEGY
6 janvier 2011

Entrepreneuriat et innovation : le débat

Autour de Cédric Manara, trois intervenants de prestige présentent leur vision de la performance juridique dans des groupes marqués par l’innovation.

Alexandre Menais, directeur juridique France, Benelux et Maurice d’Accenture. Alexandre Menais a été juriste au Crédit Mutuel Nord Europe, directeur juridique de Xerox puis eBay. Il est guest speaker dans le MsC Tax&Legal de l’Edhec. L’objectif est de témoigner de l’impact du droit dans la création de valeur chez Accenture. Accenture, fondé sur le principe « high performance delivered », est une entreprise de conseil qui a fondé son développement sur l’innovation. La culture juridique s’impose de manière naturelle par des références partagées et des manières de faire communes. Même si elle est connue par tous, il est important de la formaliser et d’y mettre des mots. Il faut mettre des mots sur des valeurs qui constituent le quotidien des collaborateurs. Accenture est fondé sur une croyance que la société est globale, des valeurs, et une empreinte. Une empreinte est des éléments qui ont jalonné la vie de la société. Le département juridique d’Accenture est composé de 1000 personnes dont ½ de juristes et ½ de contract managers. Alexandre Menais manage 40 personnes. Parmi les facteurs clé de succès se trouve la culture juridique d’Accenture.

L'une des démarches innovantes est l'externalisation des activités à faible ou à forte valeur ajoutée. A faible valeur ajoutée, le but est de réduire le coût (ie présence d’un bureau à l’ile Maurice chargé de validation de contrats simples). A forte valeur ajoutée, l’objectif est de faire appel à des experts pour des domaines très techniques plutôt que de tenter d’avoir une expertise soi-même. Les équipes travaillent en mode projet.

Un autre apport de la fonction juridique est le management du risque juridique. Pour les contrats conclus, les managers doivent remplir une checklist juridique qui, si elle n’est pas remplie, n’autorise pas à remplir le contrat. Cela permet d’attirer l’attention du manager sur le risque juridique qu’il prend.

Ces cultures juridiques d’entreprise d’Accenture pilotent l’ensemble des comportements collectifs de l’entreprise. Tous les nouveaux arrivants chez Accenture ont un training dans lequel intervient un juriste.

Pour Yoram Elkaim, il existe 3 dynamiques qu’il faudrait enseigner:

Le juriste doit apprendre à mesurer le risque. Il ne peut pas dire « c’est risqué » mais « pourquoi, comment c’est risqué ». Quand on travaille avec des scientifiques, il y a peu de place pour l’irrationnel. Ils peuvent entendre tous les arguments, mais il faut les justifier. Il faut prendre en compte le risque économique, financier, réputationnel, déontologique et éthique.

C’est au juriste de participer à la création du droit. Le juriste dans une société technologique doit participer à la création du droit. C’est notamment le cas du droit mou, des chartes, codes de déontologie. Il peut exister des domaines de co-régulation avec le gouvernement. Le juriste n’est pas là seulement pour appliquer des textes existants. C’est d’autant plus vrai pour Google qui est sollicité pour apporter de l’information  aux décideurs sur l’évolution technologique et ses implications. Ce travail se fait au niveau national, communautaire et international.

Quand les juristes et les ingénieurs discutent ensemble, leur échange peut créer des innovations que chaque groupe n’aurait pas pu développer séparément. L’exemple de Youtube est éclairant. A l’origine, il y avait un formulaire de plainte qui entraînait la disparition de la vidéo. Or, le plus souvent, le titulaire du droit de propriété intellectuelle n’est pas opposé à la diffusion de la vidéo mais au fait qu’on ne lui a pas demandé son avis et qu’il n’est pas rémunéré. Les ingénieurs ont créé un « content id », de reconnaissance de l’image, et a ensuite négocié avec les propriétaires des images la solution automatique de soit supprimer le contenu, soit garder le contenu mais demander à Google de le monétiser. Suite à cette innovation juridico-technologique, 70% des titulaires de droits sont choisi la monétisation.

Le juriste ne doit pas seulement donner son avis, mais prendre des décisions face au client interne.

La culture de Google dans son activité de base est très influencée par la culture anglo-saxonne. En interne, dans l’organisation, Google encourage une circulation d’information très large.

Fabrice Nastalski est avocat chez Ernst&Young, spécialisé en nouvelles technologies. Pour lui, l'imact du juriste sur la création de valeur dans le domaine des nouvelles technologies est multiple. Le risque est une exposition du patrimoine personnel de l’entrepreneur. L’entrepreneur va choisir une forme sociale, aux statuts et pactes d’actionnaires. La culture juridique va permettre de capter l’innovation, puis la protéger, puis optimiser cette protection en termes de développement de l’innovation. La culture juridique va permettre de monétiser cette innovation. Les risques de privacy sont des risques nouveaux qui sont apportés par les nouvelles technologies de l’information, les réseaux sociaux, etc.

Cédric Manara, professeur à l’EDHEC, lui, conclut avec une typologie de trois types de sociétés confrontées au risque juridique.

Chercheur d’or. Des personnes qui se sont mises à faire des choses sur l’Internet sans vérifier la législation. Il existe une forme de « risque accepté » et si on se fait poursuivre on ferme tout.

Sociétés présentes sur un à trois marchés nationaux. Il existe une conscience du risque qui se traduit par certains comportements d’éviction du risque (exemple PriceMinister qui a choisi de renoncer à du chiffre d’affaire en n’ouvrant pas par exemple un rayon luxe)

Les grands acteurs internationaux (Ex eBay) vont se frotter à la législation nationale. Leur modèle économique n’est pas forcément plus sûr. Du fait de la diversité et la nécessité d’innovation, il faut aller vite sans nécessairement prendre le temps de vérifier l’ensemble des éléments de la légalité. On va tenter de faire triompher ses vues, éventuellement d’obtenir une évolution de la législation.

Plus d'informations sur la stratégie juridique des entreprises : http://legalstrategy.canalblog.com

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Olivier BEDDELEEM

Maître de conférences à l'EDHEC Business School

beddeleemo@gmail.com

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