Plus de protection des commerçants contre les sites situés à l'étranger

Il y a quelques années, il était relativement aisé pour un opérateur économique de contourner le droit de propriété intellectuel d'une entreprise française en établissant un site internet à l'étranger. En effet, la protection d'une marque ou d'un brevet est national. Pour protéger une marque dans plusieurs pays, il faudrait déposer cette marque dans tous ces pays. Naturellement, puisque la protection d'une marque est payante, un commerçant qui n'a pas d'activité en Allemagne ne déposera pas sa marque en Allemagne. Il suffisait donc pour un concurrent d'utiliser la marque dans l'un des pays dans lesquels celle-ci n'était pas déposée. La marque n'étant pas protégée dans ce pays, et l'entreprise française n'ayant pas d'activité dans ce pays, le risque que le concurrent soit condamné dans ce pays était relativement faible.

Face à cette situation, les juridictions françaises ont réagi. En application du réglement européen du 22 décembre 2000 relatif à la compétence juriciaire en matière civile et commerciale, le juge compétent en matière de responsabilité délictuelle est le juge du lieu où le fait dommageable s'est produit ou est susceptible de se produire. Ainsi, un site internet Allemand accessible depuis la France pourra être poursuivi pour concurrence déloyale devant un juge français. Cette position a été réaffirmée par deux ordonnances rendues le 16 mai 2008 par le juge de la mise en état de la 3ème chambre civile du TGI de Paris (source : http://www.journaldunet.com/expert/e-commerce/27913/litiges-transfrontieres-sur-le-net---quelle-est-la-competence-du-juge-francais.shtml).
Même s'il faudra ensuite faire appliquer cette décision à l'étranger, le fait que le juge français soit compétent pour juger d'une concurrence déloyale pratiquée sur le sol français est déjà  un élément très protecteur. De plus, au sein de l'Union Européenne, il sera relativement simple de faire appliquer ce jugement français.

© Olivier BEDDELEEM, enseignant chercheur à l'ISEG, 2008